L’année 2014 avait déjà été la plus chaude depuis le début des relevés météo en Californie mais ce début d’année (janvier-mars) est marqué par une anomalie positive encore plus importante, selon l’agence américaine NOAA. L’Etat est en même temps touché par une sécheresse exceptionnelle et l’approvisionnement en eau est menacé, le manteau neigeux des montagnes californiennes ayant quasiment disparu.
Les hivers se suivent et se ressemblent aux Etats-Unis, avec un ouest chaud et un est glacial. C’est ce que l’on appelle le « dipôle » : des hautes pressions prévalent au nord-est de l’océan Pacifique tandis qu’une dépression permet à l’air arctique de s’engouffrer de l’autre côté du pays. Conséquence, les tempêtes hivernales bloquées par les hautes pressions sont déplacées bien au nord de la Californie, qui ne reçoit plus de pluies. L’Etat traverse ainsi une sécheresse depuis 4 ans, peut-être la pire des 1200 dernières années, selon une récente étude. Il y a déjà eu des périodes de précipitations déficitaires mais c’est surtout la conjonction avec des températures aussi élevées qui rend cette sécheresse exceptionnelle.
Si l’air froid venu de l’Arctique a plongé dans l’est des Etats-Unis cet hiver, les températures les plus extrêmes ont été enregistrées dans l’ouest. Le climat est donc très contrasté dans le pays. Sur janvier-mars, New York et le Vermont ont connu des anomalies négatives record avec respectivement -3,8°C et -3,6°C. La Californie, de son côté, a enregistré sur la période janvier-mars un record de chaleur assez stupéfiant avec une anomalie positive de +4,2°C. On trouve de tel écarts à la moyenne dans tous les Etats de l’ouest américain : +4,3°C dans l’Idaho et l’Oregon et même +4,5°C dans le Nevada !
Il aura ainsi fait en moyenne 11,7°C sur les trois premiers mois de 2015 en Californie. Le précédent record avait été établi en 2014 avec 10,7°C sur janvier-mars. Sur l’ensemble du pays, les températures sont de +1,1°C par rapport à la moyenne malgré la vague de froid dans l’est.
La marque du changement climatique ?
Reste maintenant à déterminer si cette configuration est liée au changement climatique. Dans une étude parue en septembre 2014, deux chercheurs de l’université de Stanford, Noah Diffenbaugh et Daniel Swain, affirmaient que la persistance et l’intensité du système de haute pression étaient inégalées depuis 1947, date des premières données disponibles sur la circulation atmosphérique. Des simulations climatiques ont été menées afin de déterminer comment pouvait évoluer le climat avec et sans accroissement de la quantité de gaz à effet de serre. Le résultat est que les systèmes de haute pression comme celui de 2013-2014 ont trois fois plus de chances de se produire sous le climat actuel que sous celui d’avant la révolution industrielle.
Simon Wang, un chercheur de l’université de Utah State, a également découvert un possible lien entre le réchauffement climatique et les phénomènes comme la sécheresse en Californie, couplée à des vagues de froid dans l’est des Etats-Unis. Dans Geophysical Research Letters, l’étude de Simon Wang décrivait en mai 2014 un véritable jeu de dominos climatique favorisant l’existence de deux pôles, l’un formé par des hautes pressions dans l’ouest des Etats-Unis, l’autre formé par des basses pressions au niveau des Grands Lacs, dans l’est du pays. A l’origine de cette configuration, le réchauffement de l’ouest du Pacific tropical qui aurait perturbé la circulation atmosphérique de haute altitude jusqu’au nord-est du Pacifique, favorisant un système de haute pression dans cette région.
Une théorie concurrente – ou complémentaire – impute la perturbation de la haute atmosphère au réchauffement de l’Arctique, susceptible également de conduire à des situations de blocage météo avec des canicules, des sécheresses ou des vague de froid. Cette idée est défendue par Jennifer Francis, spécialiste du climat à la Rutgers University.
Avec l’arrivée annoncée d’un épisode El Nino, la Californie pouvait espérer des pluies mais finalement le phénomène a tardé à se manifester. S’il a été officiellement annoncé il y a quelques semaines, il est d’intensité modérée et n’a pas permis d’améliorer la situation. Près de la moitié de la Californie est encore dans un état de « sécheresse exceptionnelle », le niveau le plus sévère.
En raison de la sécheresse, le gouverneur de l’Etat, Jerry Brown, a annoncé pour la première fois des restrictions d’eau, une décision inédite qui conduit les villes à abaisser leur consommation de 25%. Il n’y a quasiment plus de neige dans les montagnes de la Sierra Nevada, principal pourvoyeur en eau de la Californie. Les derniers relevés montrent que le déficit en couverture neigeuse a atteint un niveau record : seulement 5% de la moyenne. Le précédent record était de 25%. A Philips, la neige a même totalement disparu, un phénomène qui ne s’était jamais produit depuis 1941, date des premières mesures.
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