Climat

Les glaciers en fort déclin au 21è siècle

La fonte des glaciers a accéléré depuis une quinzaine d’années, atteignant un niveau sans précédent. D’après une nouvelle étude parue dans The Journal of Glaciology, le phénomène est désormais inexorable et se poursuivra même si le réchauffement climatique fait une pause.

En plus d’être un indicateur du changement climatique, la fonte quasi-généralisée des calottes glaciaires et des glaciers du globe est surveillée de près en raison de la montée du niveau des océans. Récemment, un article publié par James Hansen et 16 autres spécialistes du climat pointait le risque d’une importante élévation, jugé encore plus grand que ne le prévoient la plupart des études. La topographie de l’Antarctique et du Groenland est de mieux en mieux connue et les nouvelles données laissent en effet penser que ces régions sont plus sensibles au réchauffement climatique qu’on ne le pensait. Une nouvelle étude suisse vient confirmer la fragilité des glaciers, mais sur toute la surface du globe cette fois : leur fonte est à un niveau sans précédent depuis le début du 21è siècle.

Cette étude a été publiée par une équipe du Service de surveillance mondial des glaciers de l’université de Zurich qui a compilé les données de centaines de glaciers à travers le monde. Les mesures ont été comparées à des données issues des satellites et à de nombreuses observations de l’évolution du front des glaciers. 47 000 observations issues de 2300 glaciers sont disponibles, certaines remontant même jusqu’au 16è siècle.

D’après l’enquête du Service de surveillance mondial basé en Suisse,  les glaciers étudiés fondent depuis 2000 d’un demi-mètre à un mètre d’épaisseur chaque année, ce qui est deux à trois fois plus que la moyenne enregistrée au 20e siècle. Les mesures ont été effectuées sur plusieurs centaines de glaciers mais d’après les images satellites le phénomène concerne des dizaines de milliers de glaciers à travers le monde entier.

L’intense fonte des deux dernières décennies a entraîné une modification de la dynamique des calottes glaciaires, rendant leur disparition progressive inexorable, selon l’étude. Les résultats préliminaires enregistrés pour les années les plus récentes, de 2011 à 2014 (non inclus dans l’étude) montrent que la fonte des glaciers se poursuit à un niveau très élevé. Le record de fonte de glace du 20e siècle, observé en 1998, a été dépassé en 2003, 2006, 2011, 2013 et probablement à nouveau en 2014.

Les pertes les plus importantes ont donc été enregistrées à partir des années 2000 mais le phénomène avait déjà pris de l’ampleur dans les années 1990. Une autre période de fonte significative a été relevée dans les années 1940-1960, avant un ralentissement dans les années 1970 et 1980.

D’après une étude publiée en 2014, l’Antarctique de l’ouest est l’une des régions les plus vulnérables de la planète. Des chercheurs de l’université Irvine de Californie et de la NASA ont pu montrer un fort accroissement de la vitesse d’écoulement des glaciers Thwaites et Pine Island dans la mer d’Amundsen. Les pertes sont telles que la désintégration de ces glaciers est désormais jugée irréversible, rien ne pouvant plus les empêcher de fondre dans la mer.

L’Antarctique de l’ouest est particulièrement sensible au réchauffement climatique en raison du bas niveau de son socle rocheux, situé sous le niveau de la mer. La quantité de glace drainée par six des plus grands glaciers de l’Antarctique de l’ouest, notamment le Thwaites et le Pine Island, a progressé de 77% entre 1973 et 2013. Si ces glaciers fondaient complètement, le niveau de la mer s’élèverait de 1,2 mètres, selon Eric Rignot, coauteur de l’étude publiée dans Geophysical Research Letters.

L’instabilité des glaciers de l’Antarctique est due au fait que les plateformes de glace sont attachées à un socle rocheux situé sous le niveau de la mer. Dans un contexte de réchauffement de l’océan, l’eau chaude située sous les plateformes fait reculer cette zone d’attache en la faisant fondre progressivement. Quand les plateformes perdent de la masse, elle ne permettent plus de contenir l’avancée des glaciers vers la mer. D’où une accélération de leur écoulement et un amincissement.

Le Groenland est aussi plus vulnérable au réchauffement de l’océan qu’on ne le pensait. Certains canyons qui bordent les côtes sont très profonds, avec un lit rocheux situé sous le niveau de la mer. Le Groenland était jusqu’à présent censé résister au réchauffement de l’océan en raison de son front rocheux qui devait empêcher l’eau de trop s’engouffrer à l’intérieur des terres. Mas des analyses publiées en 2014 indiquent que cette barrière naturelle n’est pas assez élevée et présente de nombreuses failles permettant à l’eau de se frayer un chemin à travers les terres.

La pronfondeur des fjords va permettre à l’eau chaude de s’infiltrer, faisant fondre davantage les glaciers.  Leur contribution à l’élévation du niveau de la mer devrait donc être réévaluée. Le Groenland participe pour le moment à hauteur de 20% à la montée des eaux. A l’avenir, les glaciers continueront de fondre même si les températures restent stables. Une conclusion similaire à celle du Centre de surveillance basé à Zurich.

Glacier Portage en Alaska (source : Mark Brennan)

Glacier Portage en Alaska (source : Mark Brennan)

2 réponses »

  1. Bonjour Johan,

    Même si nous avons déjà une bonne idée de ce qui nous attend, voici une autre étude, non libre, récapitulant les conséquences.
    https://phys.org/news/2018-02-glaciers.html

    D’où le constat sur la non-durabilité des barrages hydroélectriques, sans compter les cas de concentration de polluants et leur coté écocide.

    L’accès restreint ne me permet pas de vérifier, mais dans le cas des alpes, je me permet d’ajouter un exemple supplémentaire concernant les impacts, économiques cette fois-ci, il s’agit de l’industrie électronique, grande consommatrice (pour ne pas dire pilleuse) d’eau la plus pure possible pour les wafers… c’est le cas de STMicroelectronics, dans le bassin grenoblois qui exploite ce qui est appelé localement la houille blanche depuis très longtemps. Les glaciers de Belledonne semblant condamnés à terme, cela l’a conduit à se pencher sur son approvisionnement et la rationalisation de « sa » ressource.

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