Selon une étude publiée dans Nature Communications, sécheresses et pluies torrentielles verront leur fréquence augmenter en Californie au cours du 21è siècle. En cause, les phénomènes El Niño et La Niña, dont le lien avec les événements climatiques extrêmes est appelé à s’intensifier dans un contexte de réchauffement climatique.
Les épisodes El Niño et la Niña sont intimement liés au temps qu’il fait en Californie. Cela fait maintenant 4 ans que l’Etat américain traverse une sévère de sécheresse. Les conditions de type La Niña, conjuguées à l’effet de serre, sont soupçonnées d’être à l’origine de ce déficit pluviométrique. Un anticyclone bloqué au nord-ouest des Etats-Unis a littéralement asséché la Californie depuis l’hiver 2011-2012, détournant les précipitations au nord de l’Amérique.
Ces dernières années ont été marquées par des phénomènes climatiques extrêmes aux Etats-Unis. De nombreuses études ont tenté d’apporter des explications puisque les anomalies ont atteint des niveaux encore jamais observés : record de chaleur en Californie mais aussi – et en même temps – record de froid sur la côte est. Dans les deux cas les anomalies sont remarquables.
Le phénomène El Niño en cours est redouté dans certaines régions du monde mais en Californie on espère que la cascade de réactions atmosphériques apportera enfin des pluies salvatrices. Il en faudra bien pour mettre un terme à la sécheresse actuelle, peut-être la plus sévère des 1200 dernières années. Et il n’est pas sûr qu’une seule saison suffise.
ENSO a donc déjà un impact prépondérant sur le climat californien. Cette caractéristique était connue mais une nouvelle étude publiée dans Nature Communications montre que la relation entre les extrêmes météo et les épisodes El Niño et La Niña risque encore de s’intensifier au cours du 21è siècle. Cela veut dire plus de sécheresses mais aussi plus de pluies torrentielles.
Il est difficile de dire comment le climat évoluera localement avec le réchauffement climatique. Un air plus chaud est capable de contenir davantage de vapeur d’eau et certaines études indiquent que le réchauffement climatique pourrait favoriser les précipitations en Californie.
Jin-Ho Yoon, Simon Wang et leurs collègues du PNNL et de l’université d’Utah State ont cherché dans les modèles des réponses à leurs questions concernant l’avenir climatique de la Californie. Ils ont pour cela fait tourner les modèles CESM1 et CMIP5 avec et sans El Niño.
Si les émissions de CO2 suivent la tendance actuelle, la Californie devrait connaître d’ici 2080 deux fois plus de sécheresses et trois fois plus d’inondations qu’au 20è siècle, selon les simulations réalisées.
Sans El Niño et La Niña, les modèles ne prévoient pas de multiplication des événements extrêmes, malgré le réchauffement climatique. Mais quand ENSO est pris en compte, le climat de la Californie devient beaucoup plus agité. En fait, il y a une petite subtilité : ce sont davantage les éléments précurseurs d’El Niño et de La Niña qui expliquent les extrêmes climatiques, selon Jin-Ho Yoon et Simon Wang. Les deux chercheurs ont déjà publié une étude à ce sujet : les conditions observées un an avant un épisode El Niño favoriseraient les anticyclones comme celui qui s’est solidement installé au nord-ouest des Etats-Unis.
Le réchauffement du Pacifique oriental a été tel ces dernières années qu’il aurait perturbé la circulation atmosphérique de haute altitude jusqu’au nord-est du Pacifique, favorisant un système de haute pression dans cette région. Simon Wang et Jin-Ho Yoon ont ainsi constaté qu’un an avant un épisode El Niño les conditions dans le Pacifique favorisaient la sécheresse en Californie. Mais il suffit que les conditions changent à la surface du Pacifique pour qu’un phénomène de domino favorise une inversion des systèmes de pression aux Etats-Unis, apportant enfin des pluies à l’ouest américain.
Les émissions de CO2 agissent donc de concert avec ENSO pour amener des sécheresses et des inondations plus fréquentes en Californie. Si la précédente étude de Jin-Ho Yoon et Simon Wang, basée sur des observations, avait déjà montré ce lien de plus en plus ténu, le nouvel article publié dans Nature Commincations montre que les modèles climatiques prévoient pour le siècle prochain une aggravation des extrêmes climatiques dans l’Etat américain.
Références de l’étude : Increasing water cycle extremes in California and in relation to ENSO cycle under global warming – Jin-Ho Yoon, S-Y Simon Wang, Robert R. Gillies, Ben Kravitz, Lawrence Hipps, Philip J. Rasch (Nature Communications – 21 octobre 2015).
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