Le corps humain est capable de s’adapter à des conditions extrêmes de température par la transpiration à condition que l’humidité ne vienne pas contrarier l’évacuation de la chaleur. La « température humide » (une mesure combinant la température et l’humidité ) doit absolument rester en dessous d’un seuil de 35°C pour permettre la survie d’un être humain. Une analyse réalisée via des modèles climatiques montre que les extrêmes de température humide dans la région du Golfe persique sont susceptibles d’approcher, voire de dépasser ce seuil critique si les émissions de gaz à effet de serre se poursuivent au rythme actuel.
D’après une étude publiée dans Nature Climate Change, le changement climatique risque d’affecter sérieusement l’habitabilité humaine dans certaines régions du globe au 21è siècle. Cela pourrait notamment être le cas dans le Golfe Persique, où les niveaux de température et d’humidité pourraient bien devenir intolérables pour les humains qui y vivent.
La température humide est celle qu’une parcelle d’air atteindrait si elle était refroidie à pression constante par évaporation de l’eau jusqu’à saturation. C’est en quelque sorte une mesure combinée de la température et de l’humidité, que l’on peut simplement qualifier de moiteur. Par exemple, une température de 40 degrés avec 100% d’humidité représenterait une température humide de 40 degrés, ce qui serait tout simplement insupportable. Mais avec les températures de plus de 50°C que l’on peut observer dans le Golfe Persique, des niveaux d’humidité bien moindres sont susceptibles de conduire à une moiteur proche de la valeur extrême pour le corps humain.
35°C est la valeur de seuil de température humide au-delà de laquelle toute exposition pendant plus de six heures serait probablement intolérable, même pour des hommes en bonne santé. Quand le taux d’humidité grimpe, l’évaporation de la sueur est plus difficile et le corps ne peut plus se refroidir normalement. La chaleur ressentie est alors plus importante que la chaleur réelle. Avec 35°C de température, on approche du niveau de 37°C qu’il est nécessaire pour un être humain de conserver à un niveau constant. Il est actuellement rare de voir la température humide dépasser les 31°C… Mais cela pourrait changer.
Dans des conditions de chaleur sèche, le corps humain est en danger, même avec des températures bien en dessous de 60°C (les plus hautes relevées à la surface du globe). Mais l’humidité peut abaisser le niveau au-delà duquel la simple mesure de chaleur relevée au thermomètre peut devenir dangereuse. Les régions du Golfe et de la Mer Rouge sont particulièrement menacées car situées à faible altitude et à proximité de la mer, où l’évaporation liée à la chaleur permet à l’air de gagner en humidité.
Pour prédire les impacts du changement climatique à venir vers la fin du siècle (2071-2100), deux scénarios de concentration de gaz à effet de serre ont été retenus par les auteurs de l’étude : le RCP4.5, modéré, et le RCP8.5, qui traduirait la poursuite des émissions au rythme actuel.
Avec le scénario RCP8.5, la zone caractérisée par une température humide dépassant 31°C – soit les plus hauts niveaux actuels – devrait considérablement s’élargir pour inclure la plupart des régions côtières de l’Asie du Sud-Ouest, le Golfe, la mer Rouge et la mer d’Oman. Pire, plusieurs régions dépasseraient ponctuellement le seuil fatidique de 35°C.
Selon les auteurs de l’étude, les pays d’Asie du Sud-Ouest – qui comptent parmi les principaux producteurs de pétrole – auraient tout à gagner à soutenir les efforts d’atténuation mondiaux impliqués dans le scénario de RCP4.5. Ces efforts appliqués à l’échelle mondiale permettraient de réduire sensiblement la gravité des impacts prévus afin que la température humide ne dépasse pas le seuil de 35°C.
Citation : « Future temperature in southwest Asia projected to exceed a threshold for human adaptability » – Jeremy S. Pal, Elfatih A. B. Eltahir (Nature Climate Change – 26 octobre 2015)
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