Climat

La fonte du Groenland accélérée par des dépôts de poussière

On savait que la calotte du Groenland était sensible au réchauffement climatique et à la modification des caractéristiques des grains de neige. Une nouvelle étude montre que la quantité croissante d’impuretés tombant sur l’île amplifie le phénomène. Le Groenland perd ainsi sa capacité à renvoyer les rayons du soleil.

Le Groenland contient suffisamment de glace pour élever le niveau de la mer de 7 mètres. La plus grande île du monde, quatre fois plus vaste que la France, est occupée sur la quasi-totalité de son territoire par une couche de glace de 2,3 km d’épaisseur en moyenne. L’albédo du Groenland, c’est à dire sa capacité à réfléchir les rayons du soleil, lui offre une certaine protection et il y a peu de chances de voir l’immense inlandsis fondre intégralement d’ici la fin du siècle.

Plus une surface est  blanche, plus elle est capable de renvoyer les rayons du soleil vers l’espace. La calotte glaciaire du Groenland absorbe donc peu d’énergie solaire. A l’inverse, une surface sombre comme l’océan a un faible albédo, de l’ordre de 10%.

Au Groenland l’albédo est directement lié à la taille des grains de neige. La neige fraîche, extrêmement blanche, a un albédo de 90%, en raison de ses grains très fins. Mais une fois déposés sur une surface, les grains tendent à grossir, surtout lorsque la température s’élève. Le réchauffement climatique contribue donc à une diminution de l’albédo de la neige, ce qui à son tour amplifie le réchauffement dans une boucle de rétroaction.

Le système d’observation satellitaire MODIS a montré que l’albédo du Groenland avait décliné aussi bien dans les zones d’ablation que dans les zones d’accumulation. Cette diminution a été attribuée principalement au réchauffement climatique, amplifié par la baisse de l’albédo de la neige. Cette amplification explique ainsi les records de fonte lors des étés 2010 et 2012.

Cependant, une baisse de l’albédo qui ne peut être attribuée au grossissement des grains de neige a été constatée depuis 2009, selon une étude publiée dans Nature Geoscience sous la direction de Marie Dumont, (Météo France – CNRS). L’hiver et le printemps 2011 ont été les plus froids depuis 2000 et ont été marqués par une accumulation de neige supérieure à la normale. Normalement, l’albédo aurait dû être renforcé mais cela n’a pas été le cas. Un autre phénomène a dû agir pour abaisser l’albédo.

Les observations satellitaires ont permis de découvrir de hauts niveaux d’impuretés dans la neige groenlandaise entre 2009 et 2013, ce qui aurait contribué à assombrir la surface de la calotte glaciaire. Les impuretés absorbant la lumière, comme la suie, les poussières minérales et les micro-organismes présents dans la neige sont connus pour diminuer l’albédo. Cela conduit à une forte augmentation de l’énergie absorbée par la neige, même à de faibles niveaux d’impuretés. La suie est de loin l’impureté la plus efficace pour absorber la chaleur mais des mesures récentes ont montré que la teneur de la neige du Groenland en suie était faible alors que la teneur en poussière était importante. Même si son impact est moins important que la suie, sa présence en grande quantité en 2009 et 2010 laisse penser que la poussière pourrait avoir joué un rôle de premier plan, selon l’étude de Marie Dumont.

Les chercheurs estiment que les impuretés seraient responsables de la fonte de 27 milliards de tonnes de glace chaque année, soit 10% de la perte annuelle moyenne lors de la dernière décennie. La poussière pourrait venir de zones du Groenland et de l’Arctique déjà exposés à une fonte précoce de la couverture neigeuse dans le cadre du réchauffement climatique.

3 réponses »

  1. Bonjour Johan,

    Pas nécessairement une exhumation 🙂 mais une nouvelle étude qui s’approche sur ce phénomène amplificateur que sont les poussières et autres aérosols. En Arctique, la formation des nuages serait plus sensible à la pollution d’origine anthropique et autres incendies (et donc à terme un assombrissement possible des sols suivant les précipitations ?) : http://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1002/2017GL075795/full

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    • Bonsoir Ghtuz,
      Merci pour le lien, j’ai lu dans la conclusion qu’une baisse de la pollution était donc susceptible de modérer la hausse des températures en Arctique. D’un autre côté, on sait que les températures augmenteront quand la Chine limitera vraiment la pollution.

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      • L’éclaircissement régional en Europe il y a 30/40 ans (par voie technique et par délocalisation… en Chine, entre autres) semble en attester mais avec un impact négatif sur l’Arctique. J’imagine que les effets à plus long terme (après nettoyage des suies dans le temps et moins de couverture pour retenir la chaleur) peuvent aider à dissiper le surplus de chaleur emmagasinées, si d’autres boucles rétroactives n’avaient peut-être pas été déclenchées.

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