Les Etats-Unis et la Chine se sont enfin entendus en novembre 2014 sur des objectifs de réduction des émissions de CO2. Bien qu’historique, cet accord ne permettrait pas en l’état de contenir la hausse des températures sous les 2°C, l’objectif annoncé de la communauté internationale. Selon une étude parue dans Nature Climate Change, un engagement de la quasi-totalité des Etats de la planète à faire plafonner les émissions le plus tôt possible est nécessaire.
Pour un accord crédible sur le climat, il faudrait aller au-delà du clivage traditionnel entre les économies avancées et les pays en développement. La politique climatique internationale s’est montrée jusqu’à présent incapable de maîtriser la croissance des gaz à effet de serre, selon une étude parue le 15 décembre dans Nature Climate Change.
Un plafonnement en 2020 pour rester sous les 2°C
Selon l’étude, les émissions devraient culminer d’ici la fin de cette décennie dans toutes les grandes régions du monde afin qu’il y ait plus de 66% de chances de limiter l’augmentation des températures sous le seuil considéré comme dangereux de 2° C (ce qui correspond à 450 ppm équivalent CO2). Même si l’Europe et l’Amérique du Nord voient leurs émissions diminuer, la Chine devra faire davantage d’efforts et commencer à réduire ses émissions dès 2020 et non 2030.
La Chine est depuis 2007 le plus gros contributeur en matière de gaz à effet de serre. Aujourd’hui, le géant asiatique devance largement les Etats-Unis et se situe au même niveau que l’Europe pour les émissions par habitant. Compte-tenu de son nouveau statut, Pékin s’est engagé pour la première fois en 2014 sur un objectif précis de réduction des émissions, qui devrait intervenir autour de 2030. De leur côté, les Etats-Unis se sont engagés sur une réduction de 26-28% de leurs émissions d’ici 2025 par rapport à 2005.

Croissance des émissions de CO2 des 4 principaux contributeurs de la planète (Source : Global Carbon Project)
De nouvelles négociations internationales en 2015
Il s’agit d’une avancée notable de la part de deux pays qui se sont toujours montrés réticents à adopter des objectifs contraignants. Il faudra concrétiser ces engagements à l’occasion de la Conférence de Paris 2015 censée permettre de trouver un accord international sur la réduction des émissions de gaz à effet de serre pour l’après 2020, alors que le protocole de Kyoto doit arriver à terme. Ce protocole n’avait été ratifié ni par la Chine ni par les Etats-Unis, ce qui avait limité sa portée.
Entré en vigueur en 2005, le Protocole de Kyoto fut le premier accord juridiquement contraignant destiné à limiter l’accumulation de gaz à effet de serre. 37 pays s’étaient engagés à réduire leurs émissions de 5% en 2012 par rapport à la période référence de 1990. Les objectifs ont été largement dépassés avec une baisse de 18% pour l’UE entre 1990 et 2014. L’essentiel des coupures est venu des pays d’Europe de l’est après la chute du mur de Berlin.
Le protocole de Kyoto a été prolongé jusqu’à 2020 mais les pays concernés, principalement ceux de l’UE, représentent désormais à peine 15% des émissions mondiales. Pour que l’objectif de ne pas dépasser 2°C d’élévation des températures soit tenu, il faudrait une élimination totale des émissions mondiales d’ici la fin du siècle et une participation active de toutes les régions du monde d’ici là. C’est ce qui a été établi lors de la réunion internationale de Durban en 2011.
Difficile de faire plafonner les émissions de CO2 dans les économies en développement
Si elle laissait dériver ses émissions, la Chine pourrait à elle seule largement entamer le quota d’émissions de CO2 alloué à l’ensemble des pays de la planète, selon l’étude parue le 15 décembre dans Nature Climate Change. Le GIEC estime que pour avoir une chance de limiter la hausse des températures à 2°C, le monde ne peut pas se permettre de larguer plus de 1 000 gigatonnes de CO2. Si la tendance mondiale se poursuit, l’Agence Internationale de l’Energie (AIE) prévoit que ces 1000 gigatonnes seront atteintes dès 2040.
La Chine vient de s’engager sur un plafonnement des émissions autour de 2030 mais même cette promesse laisserait peu de marge de manœuvre aux autres Etats. D’autant que l’Inde et l’Afrique n’ont pas énormément de marge non plus : leurs émissions doivent plafonner aux alentours de 2035 sous peine d’entamer sérieusement le budget de 1000 gigatonnes de CO2. Ces régions du monde affichent pourtant de lourds retards de développement et un plafonnement de leur croissance paraît difficile à accepter, sachant que l’essentiel des gaz à effet de serre ont été injectés depuis 1750 par l’Europe et l’Amérique du Nord.
La Chine, quand à elle, affiche déjà des émissions par habitant similaires à celles de l’Europe. Le total largué annuellement devrait commencer à diminuer d’ici 2020 mais la croissance se poursuit à un rythme soutenu. La Chine est devenue en 2013 le premier producteur mondial d’automobiles, devant l’Europe (Russie et Turquie comprises) et les Etats-Unis.
Se contenter d’un objectif de 50% de chances de rester sous 2°C (ce qui correspond à 500 ppm équivalent CO2) permettrait de gagner un peu de temps, de l’ordre de 10 à 15 ans pour certains pays en développement. Si la tendance actuelle se poursuit, l’augmentation des émissions de dioxyde de carbone mènerait à une hausse de la température moyenne mondiale de 3,6°C d’ici la fin du siècle.
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