Selon une nouvelle étude publiée dans Nature Climate Change, le changement climatique pourrait presque doubler la probabilité des phénomènes La Niña les plus intenses.
Les épisodes La Niña peuvent impacter la météo à l’échelle du globe. C’est l’un deux états opposés de l’oscillation australe (ENSO – El Niño Southern Oscillation). Lors des phénomènes El Niño, la chaleur et l’humidité se concentrent dans l’est du Pacifique, tandis que lors des configurations La Niña, c’est l’ouest du Pacifique qui se réchauffe. La Niña signifie donc des températures plus basses dans le centre et l’est du Pacifique et une convection renforcée dans l’ouest du Pacifique.
Dans une étude publiée en 20014, Wenju Cai (CSIRO Marine and Atmospheric Research, Australie) estimait que la phénomène El Niño allait se renforcer en raison de l’influence des gaz à effet de serre. En ce début d’année 2015, il publie cette fois une étude sur la fréquence des phénomènes La Niña les plus intenses, qui pourraient eux aussi se produire plus souvent, passant de 1 tous les 23 ans à 1 tous les 13 ans à la fin de ce siècle. Ces épisodes surviendraient essentiellement après des années El Niño, confirmant les recherches antérieures de Wenju Cai.
En 1998-1999, un épisode La Niña exceptionnel a succédé à ce qui fut probablement le phénomène El Niño le plus important du 20è siècle. Lorsque survient un phénomène El Niño extrême, les conditions sont favorables à un épisode La Niña très marqué l’année suivante, selon Wenju Cai.
Mais que se passe-t-il actuellement dans l’océan Pacifique pour que les phénomènes La Niña soient plus fréquents ? Pour Wenju Cai, c’est la suite logique du renforcement des épisodes El Niño. Pour appuyer sa démonstration, Wenju Cai et son équipe ont utilisé deux épisodes La Niña. Le fort événement La Niña de 1998-99 a atteint un sommet quelques mois après le largage de chaleur dû à l’événement El Niño de 1997-98. De manière similaire, l’épisode La Niña de 1988-89 a suivi les deux El Niño consécutifs de 1986-87 et 1987-88. Dans les deux cas, El Niño serait suivi d’une remontée d’eau froide dans le Pacifique central. Ce refroidissement renforcerait les vents d’est et l’empilement de chaleur dans l’ouest du Pacifique. Cette évolution élève le gradient de température entre le continent maritime et le centre du Pacifique et favorise encore plus la remontée d’eau froide au centre de l’océan. Ainsi Wenju Cai décrit-il le passage d’un état El Niño à un état La Niña, le tout voyant sa fréquence dopée par le réchauffement climatique dû aux gaz à effet de serre.
Selon Wenju Cai, les résultats sont remarquablement cohérents dans tous les modèles utilisés dans l’étude. Selon lui, bien que la fréquence des phénomènes importants devrait augmenter, l’intensité elle-même des épisodes La Niña ne devrait pas se renforcer.
Les années 80 et 90 ont été marquées par deux El Niño extrêmement importants mais depuis 1998, les différents épisodes ont été loin d’atteindre la même intensité. Le plus fort épisode fut celui de 2010, année marquée par un record de chaleur. Les années d’El Niño extrêmes peuvent être plus de 0,3°C plus chaudes en moyenne au niveau global que celles marquées par La Niña. Le record battu en 2014 dans une configuration neutre peut être interprété comme un signe que les gaz à effet de serre commencent à prendre le pas sur la variabilité naturelle, dont la manifestation la plus spectaculaire reste l’oscillation australe. Depuis 1998, on a en revanche vu deux épisodes La Niña de forte intensité, ce qui, selon certaines études, tend à enfouir la chaleur de l’atmosphère dans l’océan. Mais cette chaleur devrait ressortir, sans doute prochainement, à la faveur d’un épisode El Niño.