D’ici la fin du 21è siècle, le sud-ouest et les Grandes Plaines des Etats-Unis risquent de subir des sécheresses sans précédent en raison des précipitations en baisse et de températures plus élevées. L’intensité des phénomènes dépasserait tout ce que ces régions ont pu connaître ces 1000 dernières années.
L’ouest des Etats-Unis a déjà connu des sécheresses très marquées, notamment entre les années 1100 et 1300. Ces épisodes ont duré de 20 à 50 ans et sont sans équivalent dans l’histoire récente. Selon une nouvelle étude publiée dans la revue Science Advances, le réchauffement climatique pourrait provoquer dans cette région du monde des mégasécheresses encore plus importantes. Des études avaient déjà montré que le Sud-Ouest américain allait s’assécher au cours du 21è siècle mais cette fois, les chercheurs préviennent que les pires conditions historiques seront surpassées si les émissions de gaz à effet de serre se poursuivent au rythme actuel.
Benjamin Cook (NASA), Toby Ault (Université Cornell), et Jason Smerdon (Institut de la Terre Lamont-Doherty) se sont attelés à la tâche délicate de comparer les conditions depuis l’an 1000 aux prévisions des modèles simulant l’évolution future du climat à l’horizon 2100.
Pour mesurer la sécheresse, les scientifiques utilisent le Palmer Drought Severity Index (PDSI), un indice évaluant l’humidité du sol grâce au calcul de la différence entre les précipitations et l’évaporation. Avec l’étude des cernes des arbres, il est désormais possible de reconstituer les conditions de sécheresse sur les 2000 dernières années et d’en déterminer le PDSI. Mais il faut encore pouvoir comparer les données récoltées aux observations récentes et aux prévisions des modèles. C’est ce qu’ont réussi à faire les chercheurs en se concentrant sur les 1000 dernières années et les données du North American Drought Atlas (NADA).
Le PDSI reconstitué sur un millier d’années a ainsi pu être comparé à 17 modèles climatiques utilisant deux scénarios retenus dans le dernier rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC). L’un d’eux (RCP 8.5) est basé sur la poursuite de la progression des émissions de gaz à effet de serre durant le 21è siècle. L’autre est basé sur un scénario d’émissions plus modéré (RCP 4.5). Les modèles indiquent que les deux régions étudiées verront les risques de sécheresse de plus de 35 ans largement augmentées : le risque passerait de moins de 10% aujourd’hui à 80% d’ici la fin du 21è siècle… Le Sud-Ouest serait davantage touché que les Grandes Plaines mais il apparaît donc comme hautement probable que l’ouest américain connaîtra d’ici la fin du siècle une mégasécheresse de plusieurs décennies.
Dans les deux régions, la sécheresse serait surtout amplifiée par les émissions de gaz à effet de serre, plutôt que par une modification de la dynamique océan-atmosphère, selon l’étude parue dans Science Advances. Dans le Sud-Ouest, on assisterait à une réduction des précipitations durant la saison froide et une augmentation de l’évaporation due à la chaleur, les deux facteurs agissant de concert pour réduire l’humidité des sols. Dans les Grandes Plaines, les tendances sont moins claires pour les précipitations au printemps et en été, l’asséchement était surtout le fait d’une évaporation en hausse. Même le scénario d’émissions le plus modéré (RCP 4.5) montre que la hausse de l’évaporation serait suffisante pour compenser les éventuelles hausses de précipitations dans certaines régions.
Ces trois dernières années, la Californie a connu des conditions de sécheresse exceptionnelles. Dans une précédente étude, publiée fin 2014, des chercheurs ont également voulu replacer cet événement dans le cadre du dernier millénaire. Daniel Griffin, de l’Université de Minnesota, et Kevin J. Anchukaitis, de la Woods Hole Oceanographic Institution, ont utilisé des reconstructions paléoclimatiques pour le centre et le sud de la Californie. Dans leur étude publiée dans Geophysical Research Letters, ils annoncent que les périodes de précipitations déficitaires de 3 ans se sont déjà produites à plusieurs reprises dans l’histoire. Mais ils estiment que la sécheresse actuelle est la plus grave des 1200 dernières années. L’étude des cernes des arbres jusqu’à la saison de croissance 2014 révèle que les précipitations au cours de la sécheresse ont été anormalement faibles, sans sortir cependant de la variabilité naturelle. La sécheresse actuelle en Californie a surtout été provoquée par les températures élevées.
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