James Hansen et 16 spécialistes du climat viennent de publier un article alertant sur les risques d’une montée du niveau de la mer plus importante et plus rapide que ne prévoient la plupart des études. L’article écarte la possibilité d’une adaptation au changement climatique via un secours technologique : ce point de vue ne comprend pas « la nature de la menace posée par l’instabilité des calottes glaciaires et l’élévation du niveau de la mer ». Un effort de réduction des émissions de CO2 doit être entrepris le plus vite possible, selon les auteurs.
James Hansen a été l’un des premiers à alerter le public sur le réchauffement global induit par les émissions de gaz à effet de serre. En tant que directeur de l’institut Goddard des études spatiales, le principal laboratoire de science climatique de la NASA, il a notamment contribué à établir les premières données relatives aux températures terrestres. Dès 1981, il publie avec la NASA un article sur l’impact du CO2, annonçant une aggravation des sécheresses dans certaines régions du monde et une montée du niveau de le mer. La température moyenne à la surface de la planète est alors de 14,3°C, un record depuis le début des relevés en 1880. En 1988, il témoigne devant le congrès américain de la réalité du changement climatique en cours. Un nouvelle fois, on enregistre un pic pour la température mondiale avec 14,4°C… En 2013, le climatologue quitte la direction de l’institut Goddard pour donner une tournure plus politique à son engagement, estimant que cette démarche est incompatible avec l’appartenance à une institution publique comme la NASA. L’année suivante, la température mondiale atteint une nouvelle fois un record avec 14,75°C. En juillet 2015, avec l’aide de plusieurs scientifiques, il dévoile enfin une étude alertant sur les risques d’un réchauffement de plus de 2°C conduisant à des effets « non linéaires » sur les calottes glaciaires.
L’étude de James Hansen est motivée par de récentes découvertes qui laissent penser que les scénarios de réchauffement anticipés par les climatologues pourraient avoir un impact plus important et plus rapide que prévu. Car ce qui a changé, ces dernières années, c’est la découverte de l’instabilité de l’Antarctique et du Groenland. Les scénarios sur lesquels se base le GIEC tablent sur moins d’un mètre d’élévation d’ici la fin du 21è siècle. Mais selon James Hansen et ses coauteurs, ces prévisions sont aujourd’hui dépassées : il y a un risque d’élévation du niveau de la mer de 5 à 9 mètres si les émissions de CO2 atteignent 700 ppm en 2100 comme le prévoit le scénario A1B du GIEC. La teneur actuelle est de 400 ppm et cela fait au moins 800 000 ans que le dioxyde de carbone atmosphérique n’a pas été à un tel niveau. La trajectoire actuelle conduirait la planète à une hausse de la température moyenne de 3,2°C à 5,4°C à l’horizon 2100. Si un tel scénario se concrétisait, de nombreuses régions se retrouveraient sous les eaux, notamment les zones les plus basses d’Europe, des portions de la côte est des Etats-Unis, le Bangladesh ou encore les plaines du nord-est de la Chine. 600 millions de personnes vivent dans des régions côtières à moins de 10 mètres au-dessus du niveau de la mer et 150 millions ne sont qu’à un mètre de la marée haute.
Pourquoi des scientifiques comme James Hansen ou Eric Rignot, spécialiste des calottes de glace et coauteur de l’étude, pensent-ils que le risque d’élévation du niveau de la mer est plus important que ce qu’anticipe le GIEC ? Commençons par le Groenland : l’île était jusqu’à présent censée résister au réchauffement de l’océan en raison de son front rocheux qui devait empêcher l’eau de trop s’engouffrer à l’intérieur des terres. Mais des analyses de la NASA et de l’université Irvine, dévoilées en 2014, indiquent qu’il n’en est rien. Cette barrière naturelle n’est pas assez élevée et présente de nombreuses failles permettant à l’eau de se frayer un chemin à travers les terres. Le Groenland est donc plus vulnérable au réchauffement de l’océan qu’on ne le pensait. Certains canyons qui bordent les côtes sont très profonds, avec un lit rocheux situé sous le niveau de la mer. D’importantes pertes glaciaires apportant de l’eau douce à l’océan et des précipitations plus importantes dans l’Atlantique Nord pourraient déstabiliser le climat en ralentissant la circulation océanique.
En Antarctique, l’instabilité est encore plus préoccupante. La quantité de glace drainée par six des plus grands glaciers de l’Antarctique de l’ouest, notamment le Thwaites et le Pine Island, a progressé de 77% entre 1973 et 2013. Selon une étude publiée en 2014, la désintégration de ces glaciers est désormais irréversible, rien ne pouvant plus les empêcher de fondre dans la mer. L’Antarctique de l’ouest est particulièrement sensible au réchauffement climatique en raison du bas niveau de son socle rocheux, situé sous le niveau de la mer. Dans un contexte de réchauffement de l’océan, l’eau chaude située sous les plateformes fait reculer la zone d’attache en la faisant fondre progressivement. Quand les plateformes perdent de la masse, elle ne permettent plus de contenir l’avancée des glaciers vers la mer. D’où une accélération de leur écoulement et un amincissement. Selon une autre étude publiée dans Science, l’eau qui s’infiltre entre les glaciers et le socle rocheux est de plus en plus chaude, ce qui tend à accélérer la fonte et le glissement des glaciers de l’Antarctique de l’ouest. Les températures de la mer d’Amundsen mer et de la mer de Bellingshausen ont fortement augmenté depuis les années 60, selon les données océanographiques.
D’après l’étude de James Hansen, le ralentissement de la formation des eaux profondes dans l’Océan Austral favorise l’élévation des températures sous les plateformes de glace de l’Antarctique où se situent les points d’attache. Dans le même temps, l’eau se refroidit en surface, ce qui entraîne une progression de la glace de mer, signe qu’un changement important est en cours dans cette région du globe. Au lien de réchauffer l’air ambiant, cette eau chaude attaque la base des plateformes de glace. Si la perte de glace accélérait, l’élévation du niveau de la mer pourrait être de plusieurs mètres d’ici 2100. Un doublement des pertes d’ici 10 ans provoquerait une telle élévation d’ici… 50 ans. Un doublement d’ici 20 ans reporterait l’échéance à la fin du siècle. Or c’est sur cette base que la perte de glace se produit actuellement, selon les auteurs de l’étude. Les scénarios sur lesquels tablent le GIEC seraient donc trop conservateurs. D’après le GIEC , la hausse des océans ne serait que de 28-98 cm selon les scénarios d’émissions de gaz à effet de serre.
Hansen et ses collègues s’appuient aussi sur le passé pour étayer leur idée d’une hausse plus importante du niveau de la mer. Lors de l’ère interglaciaire de l’Eémien, il y a environ 120 000 ans, la température globale n’était que de 1°C supérieure au niveau actuel et cela a suffi à provoquer une élévation de plusieurs mètres. D’après les données paléoclimatiques, une hausse du niveau de 5 mètres en 1 siècle constituerait le scénario le plus extrême mais les auteurs de l’étude notent que le réchauffement actuel est plus rapide que lors de toute autre période marquée par des facteurs naturels.
Qu’est-ce qu’on attend pour changer de société ? Mode de vie …Niveau de consommation…Infrastructures…Armements…PUB…
L’emballement climatique…(déjà en cours ?) ou l’effondrement ?…
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