Vendredi 22 avril, 175 pays réunis au siège de l’ONU ont signé l’Accord de Paris pour lutter contre le réchauffement climatique. Une nouvelle étape décisive les attend : les représentants des Etats ont désormais la mission de faire ratifier l’accord au niveau national. 55 pays représentant 55% des émissions de gaz à effet de serre doivent ratifier le texte pour qu’il entre vraiment en vigueur.
La cérémonie officielle a eu lieu au siège de l’ONU à New York. Le 22 avril 2016, les représentants de 175 Etats ont signé un document attestant qu’ils s’engageaient à faire ratifier l’accord de Paris. L’objectif du texte adopté fin 2015 lors de la COP21 est de contenir le réchauffement sous les 2°C par rapport à l’ère préindustrielle, voire 1,5°C si possible. La température s’est déjà élevée d’environ 1°C et la marge n’est donc plus que de 0,5 à 1°C supplémentaire pour les 75 prochaines années.
Pour entrer en vigueur, l’Accord de Paris doit encore être ratifié par au moins 55 pays représentant 55% des émissions de gaz à effet de serre. Certains Etats ont pris les devants. Les îles Fidji ont été, vendredi 12 février, les premiers à ratifier l’accord de Paris. Le Parlement des Fidji a voté à l’unanimité en faveur du texte. L’archipel s’est engagé à produire 100% de son électricité grâce à des énergies renouvelables à l’horizon 2030. À cette date, le pays veut aussi avoir diminué ces émissions de CO2 de 30 %.
Comme les Fidji, 14 autres Etats ont déposé leur ratification à New York ce 22 avril 2016 : les îles Marshall, Nauru, Palaos, Somalie, Palestine, Barbade, Belize, Grenade, Saint-Kitts-et-Nevis, Samoa, Tuvalu, les Maldives, Sainte-Lucie et l’île Maurice. Tous ont déposé leurs instruments de ratification lors de la cérémonie de signature, ce qui signifie que les gouvernements ont déjà accepté d’être légalement liés par le traité.
Parmi ces Etats figurent des archipels menacés par la montée des eaux et la diminution de leurs ressources en eau douce. D’ici la fin du siècle, si les émissions de CO2 ne sont pas limitées, l’élévation pourrait atteindre 1 mètre au niveau global. Dans le Pacifique, les Tuvalu, qui comptent 10 000 habitants, pourraient être inhabitables avec une hausse de seulement 20 à 40 centimètres. Ses « voisins », les Fidji, Kiribati, Palaos et Samoa, sont aussi très exposés.
Les gros pollueurs doivent maintenant ratifier le texte
Les 15 pays qui ont ratifié l’accord pèseront cependant peu dans la balance quand il s’agira d’atteindre le seuil des 55%. On va maintenant voir comment les Etats les plus pollueurs complèteront leur ratification. Plusieurs pays ont annoncé leur intention d’adhérer à l’accord dès 2016 : Chine, Etats-Unis, Australie, Argentine, Cameroun, Canada, France, Mali, Mexique, les Philippines. D’autres, notamment le Brésil, l’Union européenne et la Fédération de Russie, annoncent simplement vouloir compléter rapidement les mesures nécessaires pour se joindre à l’accord.
On retiendra surtout que les deux plus gros émetteurs de gaz à effet de serre, la Chine et les Etats-Unis, se sont engagés vendredi à ratifier le texte d’ici la fin de l’année. Cela pourrait donc augurer d’une entrée en vigueur rapide de l’accord de la COP21. A eux deux, Chine et Etats-Unis comptaient en 2014 pour environ 42% des émissions mondiales de gaz à effet de serre. Avec quelques engagements supplémentaires, les 55% seraient donc à portée de main.
Quelques difficultés locales risquent cependant d’entraver les processus de ratification. Aux Etats-Unis, l’administration Obama ratifierait le texte via une procédure administrative pour éviter d’affronter les climato-sceptiques du Parlement.
L’Union européenne, conformément à ses principes, devra attendre la ratification de chacun de ses États membres, avant que le texte ne soit soumis au Parlement européen puis au Conseil des ministres de l’UE. La présidente de la COP21, Ségolène Royal, a donc demandé aux Européens de démarrer le plus rapidement possible le processus de ratification.
Le président français François Hollande a pour sa part appelé l’Union européenne à ratifier l’Accord de Paris avant la fin de l’année. Le Parlement français devrait ainsi être saisi avant l’été.
Il faut rappeler qu’outre des processus de ratification différents, le contenu des contributions varie également grandement selon les Etats. 186 pays avaient soumis des engagements en amont de la COP21 pour diminuer ou faire plafonner leurs émissions à l’horizon 2030. Le défi de rester sous les 2°C nécessitera des aménagements aux contributions actuelles qui ne permettent pas en l’état d’atteindre l’objectif.
Les promesses actuelles limiteraient le réchauffement à 2,7°C
Un organisme indépendant, le Climate Action Tracker, a évalué le réchauffement qui déboucherait des contributions remises par les Etats. D’après cet organisme, les promesses des Etats aboutiraient à un réchauffement de 2,7°C en 2100 (si l’on ajoute après 2030 des projections d’émissions). Sans ces engagements, la planète se dirigerait plutôt vers +3,7°C. Il y a donc un progrès significatif mais qui reste encore insuffisant pour atteindre l’objectif de la COP21.
L’Accord de Paris a prévu en conséquence de réévaluer les contributions en 2018 et de permettre aux Etats d’ajuster leurs objectifs tous les 5 ans afin de se rapprocher progressivement de la réduction permettant de rester sous les 2°C. L’accord ne prévoit cependant pas de sanctionner les Etats qui ne respecteraient pas leurs engagements. D’ici 2018, le paysage politique mondial aura évolué, mais dans quelle direction ? Entre temps, il y a aura notamment eu l’élection présidentielle américaine…
La Chine s’est engagée à réduire ses émissions mais seulement à partir de 2030. Les Etats-Unis ont promis de réduire leurs émissions de 26 à 28% en 2025 par rapport à 2005. L’Union Européenne annonce une baisse de 40% d’ici 2030. L’Inde s’engage simplement à réduire son « intensité carbone » (c’est à dire les émissions de CO2 relatives au PIB) de 33 à 35% en 2030 par rapport à 2005. Le bilan de tout cela peut se lire sur le graphique ci-dessous, où l’on voit le décalage entre les projections liées aux engagements de la COP21 et les scénarios permettant avec de bonnes chances de rester sous 2°C et 1,5°C (pour ce dernier, des émissions négatives seraient requises en fin de siècle).
Le compteur tourne et au rythme de 10 milliards de tonnes de carbone par an, le budget s’amenuise rapidement. Le budget carbone permettant de rester sous les 2°C pourrait être épuisé d’ici 2037 au rythme actuel.
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Les USA et la Chine sont effectivement les deux plus gros pollueurs de la planète, et on peut estimer qu’ils ratifieront à reculons pour des raisons qui leur sont propres: les USA parce que c’est un pays de consommateurs effrénés qui n’acceptera pas facilement de réduire ses besoins, la Chine parce que c’est un pays de production effrénée qui a de plus à faire face à un gros problème politique: si la croissance passe sous un certain niveau, cela peut entrainer de graves mécontentements dans la population pouvant amener à des révoltes voire à une révolution, résultat: la machine industrielle doit toujours tourner à un certain régime « de sécurité »…
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Il y a effectivement une résistance aux Etats-Unis dans le camp républicain mais Obama pourrait contourner le Parlement par la voie administrative avant la fin de son mandat. Pour la suite, on verra qui sera en fonction.
La Chine va pouvoir poursuivre sa croissance et prévoit un pic d’émissions en 2030, de quoi préparer le terrain des renouvelables, du moins espérons.
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