Les prévisions de température mondiale du Met Office suggèrent que 2021 ne sera pas une année record mais quand même l’une des années les plus chaudes des archives. Après un refroidissement temporaire en 2021 lié à La Niña, les modèles suggèrent une reprise du réchauffement par la suite avec 25% de chances de dépasser le seuil de 1,5°C d’ici 2025. Mais la fourchette est très large : prises individuellement, les années allant de 2021 à 2025 sont estimées entre 0,91°C et 1,61°C au-dessus de la période 1850-1900.
Comme chaque année, le Met Office a publié sa prévision de température globale pour la période 2021-2025. Les modélisations sur 5 ans sont conçues à partir de la connaissance de l’état actuel du climat et de la variabilité pluriannuelle des océans. La température moyenne mondiale en 2021 devrait être comprise entre 0,91°C et 1,15°C au-dessus de la période 1850-1900 (0,30°C à 0,54°C au-dessus de la moyenne 1981-2010), avec une estimation centrale de 1,03°C. Ce qui en ferait la 6e année la plus chaude depuis 1850. Pour la septième année consécutive, la température globale devrait donc dépasser ou être proche de 1,0°C au-dessus des niveaux préindustriels. Le tableau ci-dessous montre la température globale par rapport à 1850-1900 d’après la moyenne Met Office-NOAA-NASA retenue comme référence par l’étude, avec prévisions pour 2021 et la période 2021-2025 :
| Année | Anomalie/1850-1900 |
| 2000 | 0,60 |
| 2001 | 0,75 |
| 2002 | 0,81 |
| 2003 | 0,82 |
| 2004 | 0,75 |
| 2005 | 0,86 |
| 2006 | 0,82 |
| 2007 | 0,82 |
| 2008 | 0,72 |
| 2009 | 0,83 |
| 2010 | 0,9 |
| 2011 | 0,76 |
| 2012 | 0,81 |
| 2013 | 0,85 |
| 2014 | 0,92 |
| 2015 | 1,09 |
| 2016 | 1,16 |
| 2017 | 1,06 |
| 2018 | 0,99 |
| 2019 | 1,12 |
| 2020 | 1,16 |
| 2021 | 1,03 |
| 2021-2025 | 0,91-1,61 |
Les prévisions de température mondiale du Met Office pour 2021 sont légèrement inférieures à ce qui a été observé depuis 2015 (sauf 2018), en grande partie à cause de l’influence de La Niña dans le Pacifique tropical, où les températures de surface de la mer sont inférieures à la moyenne. La Niña a un effet de refroidissement temporaire sur la température moyenne mondiale.
La variabilité du cycle La Niña / El Niño est un facteur important pour déterminer la température globale à court terme mais elle éclipsée par l’effet des gaz à effet de serre sur le long terme.
L’année 2015 fut la première marquée par une anomalie de 1,0°C au-dessus de la période préindustrielle (1850-1900). Les prévisions sont basées sur les principaux moteurs du climat mondial, mais elles n’incluent pas les événements imprévisibles tels que les grandes éruptions volcaniques, qui provoqueraient un refroidissement temporaire.
L’année 2021 ne sera probablement pas une année record en raison de l’influence de La Niña, mais elle sera beaucoup plus chaude que les autres années marquées par des conditions La Niña, comme 2011 (0,76°C) ou 2000 (0,60°C), et cela en raison des émissions anthropiques de gaz à effet de serre.
Les prévisions du Met Office pour 2020, émises fin de 2019 (0,99°C à 1,23°C, avec une estimation centrale de 1,11°C), concordent avec la température réellement observée, à savoir 1,16°C au-dessus de la période préindustrielle. Pour la comparaison avec la température observée, le Met Office prend comme référence la moyenne HadCRUT4-NOAA-NASA.
A noter que le Met Office vient de sortir une nouvelle version, HadCRUT5, qui revoit les températures récentes à la hausse. Cette nouvelle version propose une mise à jour des températures de surface de la mer et adopte la technique d’interpolation déjà utilisée par la plupart des autres agences, qui permet de prendre en compte les régions polaires. Le Met Office prendra sans doute HadCRUT5 comme référence lors de ses prochaines évaluations. La moyenne HadCRUT5-NASA-NOAA montre une anomalie de +1,22°C pour 2020 (1,28°C pour HadCRUT5 ; 1,22°C pour NASA ; 1,18°C pour NOAA) au lieu de +1,16°C dans la version avec HadCRUT4.
Au cours de la période 2021-2025, la température annuelle mondiale devrait rester élevée et se situera très probablement, selon les années prises individuellement, entre 0,91°C et 1,61°C au-dessus 1850-1900. D’après le graphique du Met Office, la fourchette basse (+0,91°C) correspond à l’épisode La Niña en cours mais les années suivantes pourraient être nettement plus chaudes. En l’absence d’une éruption volcanique majeure, un nouveau record est possible d’ici 2025. Il y a une petite chance (~ 25%) qu’une année dépasse temporairement 1,5°C. Le graphique ci-dessous laisse entrevoir cette éventualité dès 2023 (prévisions en bleu).

L’analyse du Met Office va dans le sens des projections publiées auparavant par l’Organisation Météorologique Mondiale (auxquelles le Met Office contribue) pour la période 2020-2024. La température mondiale devrait se situer selon l’OMM entre 0,91°C et 1,59°C au-dessus de 1850-1900. Les chances de voir une année excéder 1,5°C sont estimées à 24% par l’OMM ; celles de voir au moins un mois dépasser ce seuil lors de la période 2020-2024 sont évaluées à 70%. Ci-dessous, les modèles utilisés pour l’étude de l’OMM, dont celui du Met Office Hadley Center (MOHC) :

Pour la période 2021-2025, les incertitudes dans les prévisions sont importantes. La plupart des régions devraient être plus chaudes que la moyenne 1981-2010, mais un refroidissement régional est possible, en particulier sur certaines parties de l’Océan Austral. Le réchauffement devrait surtout se faire sentir à la surface des terres et sur les hautes latitudes nordiques. Le gyre subpolaire de l’Atlantique Nord pourrait se réchauffer, avec des impacts climatiques potentiellement importants sur l’Europe, l’Amérique et l’Afrique.
En l’absence d’une éruption volcanique majeure, un nouveau record pourrait être battu dans les cinq prochaines années. En moyenne sur l’ensemble de la période 2021-2025 (et non les années prises individuellement), la température mondiale devrait se situer entre 1,20°C et 1,46°C au-dessus des conditions préindustrielles (0,59°C à 0,85°C au-dessus de la moyenne 1981-2010).
Les prévisions sont liées en grande partie aux niveaux toujours plus élevés de gaz à effet de serre, précise le Met Office. Cependant, d’autres changements dans le système climatique, notamment l’oscillation décennale du Pacifique (PDO), l’oscillation multidécennale atlantique (AMO) contribuent également. Après l’accalmie de 2021, les prévisions se situent dans la fourchette moyenne à supérieure de la plage simulée par les modèles CMIP5 qui n’ont pas été initialisés avec des observations.

Ces prévisions pourraient cependant être remises en cause par une importante éruption volcanique (imprévisible par nature) ou un retour très soudain à des conditions PDO ou AMO négatives (qui pourraient temporairement ralentir le réchauffement). Contrairement aux rapports du GIEC qui visent davantage le long terme, les projections du Met Office sont basées sur l’état réel du climat au moment où elles sont établies. Ceci est réalisé en initialisant les modèles avec les toutes dernières observations du système climatique, les changements du forçage radiatif dus aux gaz à effet de serre, les aérosols et la variabilité solaire. Les prévisions ne capturent pas tous les pics et tous les creux de température, car la prévisibilité de phénomènes comme El Niño et La Niña se limite tout au plus à un an à l’avance. La variabilité naturelle est prise en compte dans les paramètres qui servent à établir la prévision mais la complexité du système climatique rend la tâche très difficile.
Il apparaît donc que le Met Office table sur un scénario de réchauffement après 2021 mais ses prévisions sont conditionnées à la situation dans le Pacifique. L’Oscillation Décennale du Pacifique (PDO) est une fluctuation de températures de la mer similaire à ENSO (El Niño – Oscillation australe), mais qui opère sur une échelle de temps beaucoup plus longue. La PDO peut rester dans la même phase pendant 20 à 30 ans, tandis que les cycles ENSO ne durent généralement que 6 à 18 mois. Les PDO positives (phases chaudes) sont caractérisées par des phénomènes El Niño plus fréquents et plus forts. Les PDO négatives présentent le schéma inverse.

Dans le passé, les phases de PDO positives ont coïncidé avec un réchauffement planétaire accéléré. Inversement, les phases négatives ont tiré la moyenne globale vers le bas. Après 1999, la PDO est entrée dans une phase négative, puis les années chaudes record consécutives en 2014, 2015 et 2016 ont conduit les scientifiques à envisager qu’un changement était peut-être en cours. La PDO affiche depuis un retour aux valeurs négatives mais il est encore trop tôt pour dire si cela remet en cause l’émergence d’une phase chaude à long terme.

Un phénomène La Niña est toujours en cours et il n’est pas exclu que des conditions La Niña se maintiennent lors de l’hiver 2021.
Comme le Pacifique, l’Atlantique présente des tendances multidécennales avec notamment l’Oscillation multidécennale atlantique (AMO). Pour des périodes d’environ 30 ans, l’Atlantique Nord connaît des phases chaudes ou froides. L’AMO est basé sur les anomalies moyennes des températures de surface de la mer (SST) dans le bassin de l’Atlantique Nord, généralement aux latitudes 0-80N. L’OMM tablait en 2019 sur des conditions chaudes sur la période 2020-2024 avec des niveaux cependant moins élevés que lors du début des années 2000. La tendance semble davantage assurée que celle de la PDO, qui reste incertaine.
Pour en revenir à l’analyse du Met Office, on a pu constater dans le passé que la fourchette des prévisions avait tendance à se confirmer. Celles publiées il y a cinq ans prévoyaient un réchauffement accru sur les hautes latitudes nordiques et un refroidissement dans certaines parties de l’Océan Austral. Bien qu’il existe certaines différences dans l’ampleur précise et l’emplacement des anomalies, les observations se situent dans la plage d’incertitude des prévisions. La température mondiale moyenne sur 5 ans établie en janvier 2016 pour la période 2016-2020 avait été estimée entre 1,02°C et 1,27°C par rapport aux conditions préindustrielles. L’anomalie réellement observée sur cette période de cinq ans a finalement été +1,11°C. Le scénario de réchauffement le plus rapide ne s’est pas concrétisé mais on reste dans la fourchette des prévisions.
Pour résumer, selon la variabilité naturelle, la température moyenne sur les 5 prochaines années devrait se situer entre 1,20°C (bas de la plage de prévisions) et 1,46°C (haut de la fourchette). Pour des années individuelles, des excursions sont possibles entre 0,91°C et 1,61°C. Les chances de voir les anomalies grimper à 1,5°C sont suspendues aux incertitudes sur l’évolution du Pacifique. La moyenne des prévisions des modèles dernière génération CMIP6 (qui doivent être utilisés dans le prochain rapport du GIEC) table sur un franchissement du seuil entre 2030 et 2032.

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