Climat

Les prévisions du Met Office pour 2023

La prévision annuelle de température mondiale du Met Office pour 2023 suggère que l’année prochaine sera l’une des années les plus chaudes jamais observées.

D’après le Met Office, la température moyenne mondiale pour 2023 devrait se situer entre 1,08°C et 1,32°C (avec une estimation centrale de 1,20°C) au-dessus de la moyenne de la période préindustrielle (1850-1900). Il s’agirait alors de la dixième année consécutive avec des températures atteignant au moins 1°C au-dessus des niveaux préindustriels. L’estimation centrale de 1,20°C pour 2023 représenterait la 4e anomalie la plus élevée des annales. L’année 2022 est en passe d’être la 5e ou 6e année la plus chaude, selon les séries de température prises en considération.

La graphique ci-dessous montre l’évolution de la température globale de 1880 à 2022 (données provisoires pour 2022) par rapport à la période préindustrielle (moyenne 1850-1900) pour cinq séries d’observations (HadCRUT5 du Met Office, NOAA, NASA, ERA5, Berkeley Earth).

Anomalies de température globale par rapport à 1850-1900 d’après HadCRUT5(Met Office), NOAA, NASA, ERA5, Berkeley Earth.

Le graphique suivant montre la moyenne des observations jusqu’à 2022 ainsi que la prévision du Met Office pour 2023, à savoir une valeur centrale de +1,20°C avec une fourchette de +1,08°C à +1,32°C.

Moyenne des observations de température globale de 1980 à 2022 (en rouge) et prévision du Met Office pour 2023 (pointillés noirs) avec fourchette de prévision.

La température mondiale au cours des trois dernières années a été influencée par l’effet d’un épisode La Niña prolongé. Des températures de surface de la mer plus froides que la moyenne se produisent dans le Pacifique tropical. La Niña a un effet de refroidissement temporaire sur la température moyenne mondiale.

Pour l’année prochaine, le modèle climatique du Met Office indique la fin des trois années consécutives avec un état La Niña et un retour à des conditions relativement plus chaudes dans certaines parties du Pacifique tropical. Ce changement conduira probablement à ce que la température mondiale en 2023 soit plus chaude qu’en 2022.

Jusqu’à présent, 2016 et 2020 ont été les années les plus chaudes depuis le début des observations en 1850. 2016 a été une année El Niño où la température mondiale a été dopée par des eaux de certaines parties du Pacifique tropical lors de l’hiver 2015-2016. 2020 a été stimulée par les conditions relativement chaudes du Pacifique en 2019, dans une bien moindre mesure que l’épisode majeur de 2016.

Sans un épisode El Niño pour augmenter la température mondiale, 2023 ne sera peut-être pas une année record, mais avec l’augmentation de fond des émissions mondiales de gaz à effet de serre qui se poursuit à un rythme soutenu, il est probable que l’année prochaine sera une autre année notable dans la série, d’après le Met Office.

Certains modèles prévoient l’émergence de conditions El Niño dans la 2e partie de l’année 2023 mais les effets devraient principalement se faire sentir fin 2023 et surtout en 2024.

La série des années les plus chaudes a commencé en 2014. Depuis lors, les températures mondiales ont dépassé 1,0°C au-dessus de la période préindustrielle (1850-1900). Sur la période 2014-2022, l’anomalie globale s’élève à 1,17°C d’après la moyenne des séries HadCRUT5, NASA, NOAA, Berkeley Earth et ERA5.

Il faut noter que les prévisions sont basées sur les principaux moteurs du climat mondial, mais elles n’incluent pas les événements imprévisibles tels que les grandes éruptions volcaniques, qui provoqueraient un refroidissement temporaire.

Les prévisions du Met Office pour la température moyenne mondiale en 2022, publiées fin 2021 (0,97 °C à 1,21 °C avec une estimation centrale de 1,09 °C), concordent bien avec les dernières observations de la température mondiale jusqu’à présent cette année. Les données de janvier à octobre 2022 montrent que la température moyenne mondiale est d’environ 1,16 ⁰C au-dessus des niveaux préindustriels.

Le tableau ci-dessous compare les prévisions annuelles de température de surface moyenne mondiale du Met Office (à gauche) et les températures observées (à droite) pour la période 2000-2022 à partir de séries de données combinées issues de différentes sources (Met Office, NOAA, NASA, Berkeley Earth, ERA5) , par rapport à la période préindustrielle 1850-1900.

YearEstimation centrale du Met Office l’année précédenteTempérature observée
20221.091.16 [provisoire]
20211.111.11
20201.191.27
20191.181.24
20181.081.11
20171.141.19
20161.231.28
20151.031.15
20140.961.00
20130.960.94
20120.870.91
20110.830.87
20100.971.00
20090.830.92
20080.760.79
20070.930.91
20060.840.91
20050.900.95
20040.890.80
20030.940.88
20020.860.89
20010.860.81
20000.800.67

D’après une analysée publiée par l’Organisation météorologique mondiale début 2022, il est extrêmement probable que l’une des cinq prochaines années soit la plus chaude jamais enregistrée, battant le record de 2016. La probabilité qu’au moins une des cinq prochaines années dépasse 1,5 °C au-dessus des niveaux préindustriels est estimée à près de 50%.

D’après la mise à jour mondiale annuelle à décennale sur le climat produite avec l’Organisation météorologique mondiale, les années 2022-2026 seront très probablement (93% de chances) plus chaudes que la moyenne 2017-2021. 

L’OMM avait estimé début 2022 que les années 2022-2026 devraient afficher une température annuelle comprise entre 1,1 °C et 1,7 °C au-dessus des niveaux préindustriels. Il n’est donc pas exclu, selon l’analyse de l’OMM, de voir une année approcher 1,7°C d’ici 2026. Il faudrait pour cela qu’un événement El Niño majeur survienne. Comme on l’a vu, certaines modèles tablent sur l’émergence de conditions El Niño dans la deuxième moitié de 2023. Reste à savoir quelle sera l’ampleur du phénomène s’il émerge.

La plupart des modèles indiquent une interruption de l’événement actuel de La Niña et une transition vers ENSO-neutre en janvier-mars 2023. Ensuite, il y a de fortes chances que ENSO-neutre persiste jusqu’en avril-juin 2023, et un transition vers El Niño par la suite. Les probabilités de conditions El Niño restent très faibles jusqu’au printemps boréal mais pendant l’été boréal, ces probabilités sont les plus dominantes (49 % en mai-juillet, 60 % en juin-août, 64 % en juillet-septembre, 66 % en août-octobre 2023).

Le tableau ci-dessous montre la probabilité pour chaque période de trois mois de voir se mettre en place des conditions La Niña, neutres ou El Niño entre décembre-janvier-février 2022-2023 et août-septembre-octobre 2023. Attention, les modèles se heurtent à la barrière de prévisibilité du printemps. Cela signifie que tant que le printemps ne sera pas passé, les prévisions resteront aléatoires. Sur la base de la prédiction moyenne multimodèle, les probabilités en pourcentage pour les conditions La Niña, ENSO-neutre et El Niño (utilisant des seuils de -0,5 °C et 0,5 °C ) sur les 9 saisons à venir sont les suivantes :

SeasonLa NiñaNeutralEl Niño
DJF67330
JFM36631
FMA14824
MAM48214
AMJ26731
MJJ34849
JJA33760
JAS43264
ASO52966
Source : CPC-IRI

Dans le cadre de l’Accord de Paris de 2015, les pays ont convenu de maintenir le réchauffement climatique bien en dessous de 2°C, et de préférence de le limiter à 1,5°C par rapport aux niveaux préindustriels. Mais d’après l’OMM, c’est désormais du 50/50 pour qu’au moins une année dépasse 1,5 °C au-dessus des niveaux préindustriels d’ici 2026. Une seule année de dépassement supérieur à 1,5 °C ne signifie pas que la planète a dépassé officiellement le seuil emblématique de l’Accord de Paris. Elle révèle que nous nous rapprochons de plus en plus d’une situation où une température de 1,5 °C pourrait être dépassé sur une période prolongée.

Officiellement, la déclaration selon laquelle la Terre a atteint un réchauffement de 1,5 °C depuis l’ère préindustrielle ne sera pas faite après qu’une seule année, ou un seul endroit, ait dépassé ce seuil. Un premier dépassement au-delà de 1,5 °C serait temporaire, probablement aidé par une anomalie climatique majeure telle qu’un schéma météorologique El Niño. 

Le réchauffement est mesuré comme une moyenne mondiale sur 20 ans, pour tenir compte de la variabilité naturelle du système. Le rapport du GIEC AR6 définit le « temps de franchissement du seuil » comme le point médian de la première période de 20 ans où la température globale de l’air de surface est en moyenne supérieure à la température seuil.

Catégories :Climat

7 réponses »

  1. Le prolongement de la tendance actuelle nous donne +1,5°C vers 2035, avec des années plus chaudes avant. Sécheresses et canicules sévères à répétition en perspective pour nous… Il n’est jamais trop tard pour limiter la casse, mais de la casse on en aura.

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  2. Le dernier paragraphe de l’article rapporté par Anonyme sur l’impact inattendu de l’éruption du Hunga-Tonga se conclu par:  »Un tel effet de réchauffement du système climatique n’avait jamais été observé après une éruption volcanique, événement qui amène usuellement un refroidissement transitoire. Cet effet, dû à la vapeur d’eau, est susceptible de persister sur une durée de 2 à 3 ans au moins ». La phase La Niña actuelle qui semble inhabituellement longue (environ 3 ans) est peut-être tributaire de cette éruption volcanique. Cela me laisse songeur.

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    • L’éruption du Hunga-Tonga avait déjà été évoquée dans de précédents commentaires. Ses conséquences semblent inédites. Je fais donc remarquer à Anonyme qu’il ne faut pas généraliser les effets du Hunga-Tonga à ce que l’on peut attendre des éruptions à l’avenir. Cette éruption est un cas particulier qui ne change pas ce qui est dit de l’impact refroidissant des éruptions volcaniques majeures en général. Certaines peuvent entraîner l’injection de dioxyde de soufre (SO2) dans la stratosphère, ce qui atténue le rayonnement solaire. L’effet est variable en fonction des quantités émises, de l’altitude atteinte et de la latitude de l’éruption.

      Le cas du Hunga Tonga apparaît comme relativement complexe, comme le montre une étude dédiée (https://www.nature.com/articles/s43247-022-00618-z). Il n’y a pas eu d’injection massive de dioxyde de soufre, à peine 2% de qui a été émis par le Pinatubo en 1991. Il a donc d’abord été suggéré que l’impact du Hunga Tonga sur la couche d’aérosol stratosphérique et le climat était négligeable. Mais contrairement aux premières estimations, des analyses ont montré la formation très rapide d’aérosols en raison de la disponibilité exceptionnellement importante en vapeur d’eau.

      D’un autre côté, la vapeur d’eau massivement injectée dans la stratosphère par l’éruption du volcan sous-marin a un effet de réchauffement, qui l’emporte au final. L’effet radiatif combiné des aérosols et de la vapeur d’eau a conduit à un réchauffement à l’échelle globale de l’ordre de 0,2 W/m2, comme le suggère le compte-rendu du CNRS évoqué par Anonyme.

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  3. En France, il a fallu attendre 40 ans pour que le record de chaleur en moyenne annuelle de 1949 soit battu. Puis, ces records sont tombés de plus en plus souvent. Depuis 2011, il n’a jamais fallu plus de 4 ans pour battre le précédent record. Depuis 2018, le record tombe tous les 2 ans… C’est aussi à ça qu’on voit que l’Europe se réchauffe plus vite que les autres continents.

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  4. Il faudra surveiller l’extension de la banquise antarctique ces prochaines semaines. Elle est actuellement sous le précédent record à cette époque de l’année. Le record absolu de fonte date de février dernier.

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