L’accélération de la hausse du niveau de la mer entre le 20è siècle et les deux dernières décennies a été beaucoup plus importante qu’on ne le pensait, selon une nouvelle étude de Harvard.

Afin de prévoir la hausse future du niveau des océans, il est nécessaire de connaître de manière précise l’élévation du niveau de la mer dans le passé. Or cette élévation entre 1900 et 1990 aurait été surestimée de 30%, selon une étude publiée le 14 janvier dans Nature sous la direction de Carling Hay et Eric Morrow. Le rapport confirme en revanche les estimations antérieures depuis 1990, ce qui suggère que l’élévation du niveau de la mer accélère. Les scientifiques imputent cette accélération à la fonte des calottes glaciaires et des glaciers de montagne due à la hausse des températures.

Les estimations précédentes faisaient état d’une élévation du niveau de la mer de 1,5 à 1,8 mm par an au cours du 20è siècle. Cela représente au total une hausse d’environ 17 centimètres, selon le GIEC, soit une moyenne de 1,7 mm par an.  Mais Hay et Morrow estiment qu’entre 1901 et 1990, l’élévation a été plutôt d’environ 1,2 millimètres par an. En revanche, depuis 1990, il y a un consensus parmi les scientifiques pour dire que le niveau global de la mer a augmenté de plus de 3 millimètres par an.

Le problème, c’est que de nombreuses évaluations se basent sur les estimations précédentes pour calculer ce qui nous attend au cours du 21è siècle. Si la variation a été surestimée entre 1901 et 1990, cela signifie que les modèles ne sont pas étalonnés de manière appropriée et cela remet en question l’exactitude des projections pour la fin du 21e siècle.

Pour augmenter la précision des estimations du niveau de la mer, Hay et Morrow ont adopté une perspective complètement nouvelle.

Jusqu’à présent, les estimations de l’élévation du niveau de la mer étaient obtenues en divisant les océans du monde en sous-régions. Les données des marégraphes étaient utilisées pour évaluer la variation dans chaque région puis la moyenne de ces taux permettait d’établir une évaluation globale.

Mais ces moyennes ne sont pas représentatives de la véritable valeur moyenne mondiale, selon Hay. Les marégraphes sont situées le long des côtes et essentiellement dans l’hémisphère nord, ce qui fait que de vastes zones de l’océan ne sont pas prises en compte dans ces estimations. Le niveau de la mer est relevé depuis 1800 grâce aux données des vieux marégraphes situés principalement en Europe du nord.

Une partie du problème est liée à la rareté des mesures, même le long des côtes, selon Morrow. « Ce n’est qu’à partir des années 1950 qu’a commencé la couverture globale, et les estimations antérieures de variation du niveau moyen de la mer ont été biaisées par cette parcimonie. »

L’élévation du niveau de la mer accélère en raison de l’expansion de l’océan due au réchauffement climatique, des changements dans la circulation océanique et de la fonte des calottes glaciaires.  40% environ de l’élévation du niveau de la mer depuis 35 ans serait due à la dilatation, selon un rapport du Global Research Program publié en 2014. L’autre grand contributeur est l’eau de fonte des glaciers qui reposent actuellement sur la terre ferme. Cela est dû principalement à la fonte des calottes de glace du Groenland et de l’Antarctique, de loin les plus importantes, mais aussi aux glaciers de montagne dans une moindre mesure.

Malheureusement, les estimations à partir de ces processus physiques ne donnent par les mêmes résultats que les données des marégraphes.

Grâce à une nouvelle méthode statistique les auteurs de l’étude ont conclu que les estimations précédentes de l’élévation du niveau de la mer pour le 20è siècle étaient trop élevées. La nouvelle méthode montre donc que l’accélération au cours des 20 dernières années est plus importante qu’on ne le pensait. Selon une autre étude publiée en octobre 2014,  l’élévation du niveau de la mer atteindrait dans le pire des cas 1,8 mètres en 2100.

Hausse du niveau de la mer depuis 1880 (source : Robert A. Rohde)