Climat

Une sécheresse comme le Dust Bowl peut-elle à nouveau se produire ?

Une nouvelle étude révèle la cause des températures record enregistrées pendant l’une des pires sécheresse de l’histoire des Etats-Unis. Le fameux épisode du Dust Bowl, dans les années 1930, aurait été aggravé par deux zones océaniques chaudes à l’est et à l’ouest de l’Amérique du Nord. Les auteurs de l’étude espèrent ainsi pouvoir mieux prévoir les épisodes du même type.

Le Dust Bowl des années 1930 reste la pire sécheresse des annales aux Etats-Unis pour ce qui est de son étendue. En juillet 1934, au plus fort de l’épisode, 80% du pays était touché, notamment le centre (Kansas, Texas, Colorado, Nouveau Mexique, Oklahoma). En comparaison, la sécheresse qui affecte gravement la Californie depuis 4 ans est plus localisée. En outre, le Dust Bowl  ne fut pas seulement un phénomène météo, les pratiques agricoles de l’époque et le manque de connaissances environnementales auraient aussi aggravé la situation, favorisant les tempêtes de poussière.

Les deux étés les plus chauds du Dust Bowl furent ceux de 1934 et de 1936. Les records battus à l’époque soutiennent encore la comparaison avec les températures des années 2000 boostées par les gaz à effet de serre. Au Kansas, les étés les plus chauds des annales restent ceux de 1934 et de 1936. De quoi s’interroger sur le type de configuration qui a pu faire émerger de telles anomalies.

Des scientifiques de l’université australienne New South Wales emmenés par Markus Donat pensent avoir trouvé la cause du phénomène. Des températures de surface de l’océan anormalement élevées ont été observées simultanément des deux côtés des Etats-Unis en 1934 comme en 1936. Dans le Pacifique, une zone chaude s’est formée dans le Golfe d’Alaska.  De l’autre côté, dans l’océan Atlantique, les températures de l’océan ont aussi grimpé plus qu’à l’accoutumée.

Anomalies de températures au printemps 1934 (Source : NASA GISS)

Anomalies de températures au printemps 1934 (Source : NASA GISS)

Selon l’article publié dans Climate Dynamics, les deux points chauds ont agi de concert pour réduire les précipitations au printemps dans le centre des Etats-Unis, mettant en place les conditions propices à des températures très élevées. Cette configuration extrêmement rare n’a jamais été observée à un tel niveau sur les 100 dernières années. Avec le réchauffement de l’océan Atlantique près de la côte est, les vents du sud qui normalement amènent l’humidité du Golfe du Mexique ont été détournés du centre des Etats-Unis. En même temps, un système de hautes pressions dans le Pacifique a également éloigné l’humidité du coeur du pays.

Les chercheurs de New South Wales ont aussi comparé les conditions climatiques de 1934 et 1936 à la sécheresse marquée par de fortes chaleurs en 2011 et 2012 dans l’ouest des Etats-Unis. Si l’anomalie positive a été retrouvée dans l’Atlantique, tout près de la côte américaine, tel n’a pas été le cas dans le Golfe d’Alaska, où les températures étaient inférieures à la normale en 2011 comme en 2012.

Anomalies de températures au printemps 2011-2012 (Source : NASA GISS)

Anomalies de températures au printemps 2011-2012 (Source : NASA GISS)

Markus Donat conclut que la sécheresse  de 2012 et 2012 n’est pas attribuable à la même configuration climatique que dans les années 30. Avant la parution de l’étude dans Climate Dynamics, il semblait bien établi que le dipôle américain (chaud à l’ouest, froid à l’est) était dû au système de hautes pressions dans le Golfe d’Alaska, combiné à des basses pressions qui avaient fait plonger l’air polaire à l’est.

En revanche, depuis 2014, la situation a changé dans le Golfe d’Alaska, avec l’arrivée d’une masse d’eau anormalement chaude. Dans le même temps, l’océan bordant la côte est atlantique était toujours chaud. La configuration était donc similaire à celle identifiée par Markus Donat en 1934 et 1936. Pourtant, les température élevées ont été relevées dans l’ouest des Etats-Unis mais pas au centre. S’agit-il d’une réfutation de la théorie des chercheurs de New South Wales ? Non, estime Markus Donat, car sa théorie n’est pas censée expliquer 100% des phénomènes. Ensuite, on peut observer une différence entre 1934/36 et 2014 : l’anomalie chaude dans l’Atlantique fut plus au nord lors de l’époque du Dust Bowl qu’en 2014. En 2014, une anomalie très froide a été observée au sud du Groenland.

Anomalies de températures au printemps 2014 (Source : NASA GISS)

Anomalies de températures au printemps 2014 (Source : NASA GISS)

Si 2014 n’a donc pas été tout à fait similaire à 1934, il viendra bien un jour où la configuration s’alignera sur celle du Dust Bowl. Pour Markus Donat, les Etats-Unis ont pour le moment eu la chance de ne pas voir émerger à nouveau le phénomène. Mais s’il survient dans le contexte actuel  marqué par le changement climatique, les effets pourraient être encore plus dévastateurs que dans les années 30, prévient-il.

Catégories :Climat, Océans

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