Climat

Record de chaleur océanique en 2022

Après le record de 2021, le contenu en chaleur des océans a atteint un niveau encore plus élevé en 2022. Plus de 90% de l’excès de chaleur dû au réchauffement climatique est absorbé par les océans, ce qui en fait un excellent indicateur du déséquilibre énergétique de la Terre.

Du fait de sa grande capacité calorifique, l’enregistrement mondial du contenu thermique de l’océan (OHC, pour Ocean Heat Content) représente de manière robuste la signature du réchauffement climatique. L’OHC est moins impacté que la surface par le bruit lié aux conditions météorologiques et la variabilité climatique tels que les événements El Niño et La Niña.

En 2022, les océans ont continué à se réchauffer à l’échelle mondiale, avec un nouveau record du contenu en chaleur entre 0 et 2000 m, selon une nouvelle étude menée sous la direction de Lijing Cheng. L’augmentation inexorable de la température des océans est le résultat du déséquilibre énergétique de la Terre, principalement associé à des concentrations croissantes de gaz à effet de serre.

Source : Cheng, L., Abraham, J., Trenberth, K.E. et al. Another Year of Record Heat for the Oceans. Adv. Atmos. Sci. (2023)

La tendance au réchauffement mondial à long terme est si stable et robuste que des records continuent d’être établis quasiment chaque année, notent les auteurs de l’étude. Le réchauffement s’est accéléré au cours des dernières décennies, avec un rythme de réchauffement plus rapide depuis environ 1990.

L’étude publiée dans Advances in Atmospheric Sciences fait office de référence pour le contenu en chaleur de l’océan avec deux ensembles de données, celui de l’Institut de physique atmosphérique (IAP) de l’Académie chinoise des sciences (CAS) et celui du National Centers for Environmental Information (NCEI) de la National Oceanic and Atmospheric Administration (NOAA).

L’analyse montre que le contenu en chaleur des océans a battu un record pour la quatrième année consécutive. Les précédents records de chaleur avaient été établis successivement en 2021, 2020 et 2019. Voici le top 5 des années les plus chaudes pour les océans, d’après IAP et NCEI. Les valeurs du contenu en chaleur sont des anomalies pour les 2000 m supérieurs en zettajoules (ZJ =1021 Joules)  par rapport à la moyenne 1981-2010.

RangAnnéeIAPNCEI
12022245238
22021234229
32020221211
42019214210
52017202189

Le léger écart entre les estimations de IAP/CAS et celles de NCEI-NOAA reflète les différences dans les méthodes d’analyse (cartographie, contrôle de la qualité, couverture des données, etc.), mais les deux jeux de données montrent quand même un excellent accord sur la durée.

Les analyses de IAP /CAS et de NCEI/NOAA sont basées sur les observations in situ disponibles provenant de divers dispositifs de mesure conservés dans la base de données mondiale sur les océans. Les données de tous les instruments sont utilisées, y compris les bathythermographes extensibles (XBT), les flotteurs Argo et divers instruments. Le réseau d’observation Argo a atteint une couverture quasi globale des 2000 m supérieurs depuis 2005 environ. L’incertitude dans les données du contenu en chaleur a été considérablement réduite au cours des dernières décennies grâce au  système d’observation des océans.

Les données ERA5 de température de l’air à la surface de la Terre montrent que l’année 2022 a été la 5è plus chaude depuis le début de l’ère instrumentale. Ce qui est déjà significatif compte-tenu de la période de triple La Niña que nous venons de connaître. Mais c’est dans l’océan que se retrouve principalement l’excès de chaleur piégé dans le système climatique, avec une capacité calorifique environ 1000 fois supérieure à celle de l’atmosphère. Les conditions La Niña qui tempèrent ponctuellement le réchauffement climatique en surface ne doivent pas induire en erreur.

Comme l’OHC est moins touchée par la variabilité climatique interne, notamment ENSO ( El Niño–oscillation australe), que la surface de la Terre, il s’agit d’une mesure claire du changement climatique mondial.

Le contenu en chaleur de l’océan (OHC) entre 0 et 2000 mètres a encore battu un record en 2022 pour atteindre un niveau sans précédent depuis le début de l’ère instrumentale. Selon les données IAP/CAS, le contenu en chaleur entre 0 et 2000 m en 2022 a dépassé le record de 2021 de 10,9 ZJ. Selon les données NCEI/NOAA, le précédent maximum a été dépassé de 9,1 ZJ.

Source : Cheng, L., Abraham, J., Trenberth, K.E. et al. Another Year of Record Heat for the Oceans. Adv. Atmos. Sci. (2023)

Pour l’OHC global jusqu’à 2000 m de profondeur, il y a une tendance sans équivoque au réchauffement des océans au cours des dernières décennies. Les 2000 m supérieurs des océans du monde se sont réchauffés en moyenne de 5,5 ZJ par an entre 1958 et 2022 , selon IAP/CAS ; de 5,3 ZJ par an, selon NCEI/NOAA.

Le phénomène s’est accéléré depuis la fin des années 1980. Selon l’analyse IAP, la tendance de l’OHC était de 2,3 ZJ par an pour 1958–1985. Depuis 1986, la tendance de l’OHC est de 8,7 ZJ par an.

Les cartes spatiales de 2022 par rapport aux conditions moyennes de 1981 à 2010 révèlent que la plupart des zones océaniques se réchauffent de manière significative, tandis que certaines zones se réchauffent à un rythme plus rapide que les autres océans.

Quatre régions (le Pacifique Nord, l’Atlantique Nord, la mer Méditerranée et l’Océan austral) affichent le contenu en chaleur le plus élevé depuis les années 1950. Les graphiques ci-dessous montrent les valeurs mensuelles (gris clair) et un lissage sur 240 mois (ligne noire) pour les différents bassins.

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1 réponse »

  1. Tout le système climatique pris en compte, 2022 est bien l’année la plus chaude. Ce n’est pas une surprise, mais la piqûre de rappel fera du bien à certains qui croient qu’on s’intéresse particulièrement à l’Europe juste parce que ça permettrait de masquer une pause mondiale…

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